Crédit Agricole Banque Privée : retour du signifiant thatchérien

Le quotidien patronal Le Monde, spécialisé dans les hululements millénaristes contre "l'aggravation des dépenses sociales" et le "déséquilibre des comptes sociaux", voit sa page web colonisée par les publicités pour "Crédit Agricole Banque Privée".

L'intitulé même de cette nouvelle entité qu'est "Crédit Agricole Banque Privée" fait sourire : les marketeux décérébrés qui sont à l'origine de ce changement de nom utilisent le signifiant thatchérien à qui-mieux-mieux, comme si nulle crise n'était venue abolir l'hégémonie idéologique de l'utopie néolibérale. "Ma Banque Privée vit au rythme des grandes places", bêle le cadre-sup mis en scène dans la campagne d'affichage.

Dans l'air du temps publicitaire, il nous semblait pourtant qu'une page était tournée. Les compagnies d'assurance s'offrent des pleines pages dans la presse nationale pour certifier qu'elles ne jouent plus leur trésorerie en bourse. Les granes surfaces jurent qu'elles réduisent leurs prix pour ne pas corroder le "pouvoir d'achat". Les slogans misent sur la "solidarité" et le retour à l'authenticité des vraies valeurs de la vie vraie. Bref : on pouvait penser que la déliquescence du capitalisme et de ses hordes de crétins financiers avait porté un coup d'arrêt à la guérilla sémantique et axiologique qui était menée depuis trente ans. La droite versaillaise du bouclier fiscal et de la liquidation de l'Etat-providence joue même à taxer les bonus des traders et à proposer, à demi-mots, une taxe Tobin !

Mais cette publicité agressive pour "Crédit Agricole Banque Privée" vient opportunément zébrer ce nouveau paysage comme un retour du refoulé. La communication de la nouvelle "marque" de Crédit Agricole sursignifie le caractère bien "privé", 100% privé, ultraprivé, de la banque ; tout l'enjeu de la campagne semble être de sougliner que cette banque est privée à fond.

Quelques clics (privés) sur le site (privé) de Crédit Agricole Banque Privée : "Un autre regard sur la banque privée". "Contactez un conseiller privé". "Un conseiller privé unique en caisse régionale", glapit le site pour requins à costars rayés (privés). "L'expertise banque privée du Crédit agricole" est là. Le caractère privé est conçu comme un authentique viagra commercial.

De deux choses l'une : ou bien, comme nous en émettons l'hypothèse, il s'agit d'un pitoyable retour du refoulé de pubards et de banquiers, qui ne peuvent décidemment se faire à l'idée que le signifiant thatchérien est passé de mode. Ou bien il s'agit, plus platement, d'une lamentable erreur de communication, où les instigateurs de ce relooking du Crédit Agricole auraient tranché en faveur de signes néolibéraux en connaissance de cause, croyant sans doute que le langage pinochetiste avait malgré tout de beaux jours devant lui pour attirer les CSP++.

En ces temps de chômage de masse, le message publicitaire de cette institution bancaire (qui, en tant que telle, spécule et se gave) correspond à peu près à "Pas de pitié pour les gueux", ou plus exactement à une confidence aux rentiers de tout poil : "Ne vous inquiétez pas, nous, on y croit encore !"

Jean-Marc Rouillan : "La mort lente est une des formes dominantes de la prison de la société néolibérale"


La peine de mort existe toujours dans les prisons françaises. Il est vrai que la tête du condamné ne roule plus dans la sciure. Le spectacle sanguinaire était trop obscène à la tragi-comédie de nos sociétés aseptisées. Mais de nos jours la peine de substitution perpétue le meurtre. Ce n’est qu’un lent assassinat façonné de mille morts quotidiennes. Une exécution consommée sur vingt ans, parfois davantage, mais tout aussi infaillible que la lame du couteau. La mort a été déléguée à la besogne des arbitraires, des violences « nécessaires », des jours sans vie, du désespoir.

Avant guerre, lorsque les exécutions publiques ne servirent plus au décorum de la violence d’État, elles furent refoulées dans l’ombre des « cours d’honneur » de l’administration pénitentiaire (AP). Aujourd’hui, on ne coupe plus le cou, ni en public ni en douce dans ce meilleur des mondes : la mort du détenu est présentée comme « naturelle » – suicides, maladies et folies. Ultime négation puisque ces défunts ne sont pas comptabilisés comme étant des prisonniers. Car si les conditionnelles médicales ont quasiment disparu de la réalité carcérale, l’administration se charge d’évacuer le mourant dans un hôpital extérieur avant qu’il ne trépasse. Quelquefois, ils attendent jusqu’au dernier coma, jusqu’au dernier souffle avant de l’effacer de leur registre. Ils craignent la rémission miraculeuse et surtout que le moribond puisse bénéficier de quelques jours supplémentaires de « liberté volée ».

De stratagèmes en dissimulations, l’administration masque encore l’évidence de cette gestion mortifère. Peu nombreux osent faire le lien entre les ravages de la mort lente et les verdicts en additions incompressibles, la psychiatrisation des centrales, le pourrissoir général des prisons entretenu par l’AP et un corps judiciaire entièrement dévoués aux thèses sécuritaires.

La peine de mort est devenue impalpable. Sans nom ni contour. Elle est administrative. Elle n’a pas de visage. Comme les juges d’application des peines ou les bureaucrates de la place Vendôme qui l’utilisent avec minutie et « innocence ». Le bourreau portait cagoule. Ces gens-là se cachent derrière les règlements, les arithmétiques pénales, le conformisme réactionnaire ambiant.

De soumissions en fausses révoltes, nous sommes tous responsables de l’instauration du nouvel ordre carcéral. Presque sans broncher, sans nous révolter, dans les prisons comme à l’extérieur, nous avons abandonné le terrain à l’institution de la mort lente. Et c’est un nouveau bagne…

La guillotine était réservée à quelques-uns, aux pires, aux moins chanceux, aux plus misérables. Le système administratif de la mort lente affecte des milliers et des milliers d’hommes et de femmes :

— les perpétuités, d’abord, dont le nombre ne cesse de croître depuis deux décennies. Avec les nouvelles politiques d’application de peine, ils ne seront plus commués. Par le passé, la perpétuité était encore, dans l’horreur, une peine à échelle humaine. Peu ou prou, le condamné savait qu’il effectuerait dix-sept ou dix-huit ans. Aujourd’hui, avec la peine de trente ans et la perpétuité « réelle » (comme s’il existait des perpétuités fictives !), les détenus ayant effectué plus de vingt années ne sont plus des exceptions ;

— les détenus accumulant plusieurs peines non « confusionnables » et à qui il faudrait au moins deux vies pour effectuer leurs condamnations ; ainsi les prisonniers libérables en 2056 ou en 2062 ne sont pas rares…

— les détenus ayant des peines incompressibles au-delà de quinze années ;

— mais la mort lente touche également des milliers de prisonniers qui ne trouvent pas en eux les ressources pour résister au rouleau compresseur de l’anéantissement produit par l’élimination carcérale et en particulier par le régime des quartiers d’isolement (QI) et des quartier de haute sécurité (QHS).

Tout dernièrement encore, la grâce croupion octroyée pour l’an 2000 et le verdict de la cour d’assises de Troyes contre les évadés de Clairvaux (comment peut-on présenter une peine de prison assortie de quinze ans de sûreté comme un verdict de clémence !) démontrent que rien ne pourra changer sans combat.

Nous sommes dos au mur. En particulier tous ceux dans les QI, soumis à la torture blanche ; tous ceux détenus dans les centrales de sécurité ; tous les prisonniers malades qui attendent en vain des libérations médicales.

Combien d’illusions perdues ? De combien de fausses promesses faudra-t-il attendre en vain l’accomplissement ?

La révolte contre la mort lente prendra-t-elle la forme d’un nouvel embrasement carcéral aussi violent que les mouvements de l’été 1974 avec sa cohorte de morts anonymes ou assumera-t-elle les formes de la guérilla telle la lutte contre les QHS ? Il est encore impossible de l’anticiper dans les contours du nouvel emprisonnement et des résistances sourdes qu’il provoque. Une chose est certaine, la prison actuelle n’est déjà plus la prison des années 1970-1980. Le carcéral se périodise avec la société dont elle est la forme supérieure de répression. Il y avait un lien évident entre les masses ouvrières de la Grande Fabrique en bleu de travail et les files prisonnières dûment numérotées en uniforme pénitentiaire. Un lien entre la chaîne de production et les entraves collectives. Entre les grands ateliers et le travail carcéral obligatoire. La prison se transforme avec la société : ses nouveaux caractères renvoient aux qualités des rapports sociaux à l’extérieur. Aujourd’hui, la mort lente est une des formes dominantes de la prison de la société néolibérale. Le « tout-prison » et les longues peines portent la marque du « zéro défaut » et du « total control » du travail flexible. Finalement la mort lente est le degré ultime de la prison précaire. Et, comme telle, cette condition déshumanisée est le reflet des populations en fin de droit.

Comme au-dehors, si le système produit l’inexorable destruction, il assure simultanément la survie minimale, juste assez pour travestir son crime et échapper aux révoltes radicales.

Les débats actuels autour du livre du docteur Vasseur ne s’attaquent en rien aux réalités du nouveau bagne[1]. Ils finissent par être phagocytés à l’institutionnalisation de la mort lente. Ils tendent simplement à améliorer la survie. En quelques jours, le thème des longues peines a été évincé au profit de l’orientation même des projets ministériels de prisons modèles – mais en son temps Fleury ne fut-elle pas une prison modèle, comme la centrale de Moulin ?! Demain, les cellules seront peut-être propres et fonctionnelles, mais les détenus y crèveront de solitude, d’indifférence, des pathologies physiques et psychiques de la prison « clean ». Car tout le décisif de la prison actuelle réside dans l’explosion des peines prononcées. Aujourd’hui, les cours d’assises condamnent à vingt-quatre, vingt-cinq, vingt-huit ans des personnes qui, il y a dix ans encore, se seraient vu infliger douze, quinze ans peut-être – mais jamais plus. Les procureurs soutiennent leurs réquisitoires inflationnistes avec les contes et légendes de futures mises en liberté conditionnelle à mi-peine. Alors qu’ils savent pertinemment que les libérations conditionnelles sont désormais exceptionnelles.

La présentation des statistiques sur la longueur des peines en France est fallacieuse. Le turn-over des petites peines interdit toute compréhension du prolongement de la durée effective du nouvel emprisonnement. Et les personnes emprisonnées pour des délits mineurs qui, hier encore, n’auraient pas occasionné d’incarcération, permettent de dissimuler la réalité actuelle. D’autant plus qu’ils bénéficient, comme les VIP, de libération conditionnelle et autres mesures de l’application des peines[2]

Nous sommes également révoltés par le battage médiatique autour de la pétition des ex-prisonniers VIP[3]. Non, M. Marest, ce genre de témoignage ne nous fait pas avancer même d’une seule année. Il nous renvoie plutôt aux vieux fantasmes sur la prison. Le carcéral se réduirait, selon eux, au sanctuaire brutal du rapport de force et du viol entre prisonniers. Quelle savoureuse pitrerie lorsque la leçon vient d’un Bob Denard ! Cette barbouze française, serviteur du régime sud-africain de l’apartheid, qui a vécu à la tête des hordes mercenaires par la violence et le viol… Et Le Floch-Prigent, ce bon manitou d’Elf, plus prompt à dénoncer la petite violence quotidienne dans les cellules d’arrivants que celle imposée par les monopoles des multinationales, dont son employeur : le plus important réseau de corruption, de racket et de violence néocoloniale des années 1980 !

Le rapport de force dans les sociétés néolibérales est plus dur à l’extérieur que dans les prisons. Où la violence et les arbitraires de l’administration sont d’une violence sans commune mesure avec les pressions entre prisonniers. Et il ne fait pas de doute que les viols sont beaucoup plus nombreux dans les bureaux des responsables du personnel, les instituts religieux ou le simple cadre familial que dans nos cellules collectives !

Nous le répétons, toute cette fausse polémique n’a pour seul but que de faire passer la réforme des prisons dans le sens voulu par Guigou et consorts. En ignorant les longues peines, l’isolement, les dysfonctionnements de l’application des peines et toute mesure véritablement favorable à la réinsertion des détenus. Les réformes de la survie n’assurent que la gestion de la mort lente.

Nous sommes déjà des centaines, bientôt des milliers, à prendre conscience de notre condition de condamnés à mort. Et nous sommes face à cette vérité crue : seule l’insurrection répond à la fin innommable à laquelle ils nous destinent ; et notre humanité ne dépend que l’insurrection. Face au crime administratif, nous n’avons plus seulement le droit de refuser, le droit de nous révolter mais, aujourd’hui, c’est devenu un devoir pour celui qui en a la possibilité, où qu’il se trouve, avec ses tous les moyens nécessaires, individuellement et collectivement.

Le combat contre l’institution des tortionnaires et des bourreaux sera sûrement sans concession. La répression sera féroce. Nous avons déjà goûté aux vendettas de l’administration pour avoir une idée de ce qu’ils nous réservent. Les crimes masqués en suicides, les tabassages, les années et les années de QI, les insultes et les vexations… Enfin, tout ce dont ils sont capables sous le couvert de la loi et des règlements. Néanmoins, notre refus ne craint plus la trique. Et que peut-il nous arriver de pire ? Si rien ne change radicalement, nous sommes déjà morts – et enterrés vivants.

Il y a urgence dans les prisons de France :

— fermeture sans condition des quartiers de torture blanche que sont aujourd’hui les QI après les QHS ;

— remise en fonctionnement des procédures d’aménagement des peines conditionnelles, commutations, compressions, permissions, extension des délais pour l’octroi de la semi-liberté ;

— libération des prisonniers ayant accompli vingt années effectives ;

— libération immédiate de tous les prisonniers malades et en fin de vie.

Jean-Marc Rouillan

Homosexualités : invariants du discours conservateur

Avec le projet de loi esquissé par la distinguée Nadine Morano, l'instauration d'un statut de "beau parent" non sexué ramène sur le devant de la scène médiatique le débat sur l'institutionnalisation du couple et de la "famille" homosexuels.

Comme à chaque fois qu'il est question d'homosexualité, un argument qui revient tout le temps est celui de la "nature". La nature, c'est un homme et une femme. Les commentateurs du Figaro.fr insistent beaucoup sur ce point, ajoutant que "où est passé le bon sens ?".

"En tant qu'écolo et consommateur de bio, je considère qu'un enfant doit avoir un père et une mère comme le veut la NATURE et toute autre situation est une anomalie anti-naturelle, un pesticide de synthèse ou une sorte d'ogm..."

Les réponses au discours naturaliste sont simples :

1) La "nature" (concept qui, de toutes les façons, n'a aucune définition tangible) comprend en son sein des relations homosexuelles.

2) Se conformer strictement à la "nature" n'est pas souhaitable (les êtres humains vivraient nus et passeraient leur temps à forniquer, ils ne communiqueraient que par signaux et dévoreraient des aliments crus...).

On peut conjecturer que la glorification actuelle de la nature (le consensus écologique) autorise un retour en grâce de l'idéologie naturaliste dans toute sa veulerie. La concomitance de la lame de fond conservatrice (pour ne pas dire fasciste) qui s'est emparée de l'Europe et du consensus écologique ne doivent pas étonner. Ces deux projets convergent pour un retour à la nature, au travail, à la terre. Ces deux projets ont pour objectif de revenir aux "vraies valeurs". De conserver ce qui provient des temps anciens.

Il est tentant d'analyser les arguments conservateurs comme des symptômes d'un monde archaïque qui tend à disparaître, comme les derniers soubresauts violents d'une société rétrograde et laide qui se bat pour sa survie avec l'énergie du désespoir. Mais ce n'est pas la vérité. Ces personnes ont le vent en poupe. Et si la droite actuelle est favorable à des évolutions minimes dans le domaine des moeurs, c'est parce qu'elle compte nombre de partisans hallucinés du capitalisme nomade hardcore et de la fluidification de l'humain qui lui est consubstantielle. Mais ce capitalisme pseudo-progressiste défait des conservatismes d'une main et construit, de l'autre main, un immense projet régressif, où la laideur le dispute au malheur.

Autre argument massue, l'idée que le droit n'a pas à enregistrer les pratiques humaines ou à régulariser des situations. Auquel cas, ajoute en général le commentateur du Figaro, pourquoi ne pas régulariser la zoophilie ?

Cet argument, de facture classique, est très courant et se retrouve sous la plume du penseur para-pétainiste Pierre Legendre. Le droit est chargé d'élever les individus vers la morale, vers le bien ; et non d'enregistrer bassement leurs pratiques. Vouloir légaliser l'existant, c'est rentrer dans une logique hédoniste irrationaliste, en tout point semblable à celle qui prévalait sous le régime nazi, dit Pierre Legendre (qui, en matière de nazisme, s'y connait effectivement).

Or, 1) oui le droit est un corpus construit, mouvant et adapté depuis des millénaires aux pratiques humaines. 2) Légaliser une situation ne veut pas dire qu'on va légaliser dans la foulée toutes les situations du monde (c'est pourtant l'absurdité que sous-entend l'argument !).

Il est triste de constater à quel point nos sociétés européennes pseudo-libérées sont en réalité des sociétés ultra-conservatrices, puritaines et biofascistes.

Ne seraient-ce point les Fatals Flatteurs ?

En parcourant un "chat" du Monde.fr avec l'écrivain balladurien Philippe Sollers, on croise certaines questions qui font irrésistiblement penser à la pate des Fatals Flatteurs du Plan B...

On parie que c'est eux ?

Zébulon : Comment parvient-on à devenir aussi érudit que vous ? Tenez-vous des fiches ? Combien de livres y a-t-il dans votre bibliothèque ? Est-il selon vous nécessaire d'avoir beaucoup lu pour devenir écrivain ?

Philippe Sollers : Un écrivain sans bibliothèque est comme un pianiste sans mains, et il faut répéter sans arrêt la formule suivante : pour savoir écrire, il faut savoir lire, et pour savoir lire, il faut savoir vivre.

Viva : Pensez-vous avoir des disciples, ou bien avez-vous refusé d'être un maître? Quoi qu'il en soit, quels sont les jeunes écrivains français que vous encouragez et dont vous pensez qu'ils vont faire une œuvre qui comptera?

Philippe Sollers : Je passe mon temps à soutenir des écrivains plus jeunes que moi, car je n'aimerais pas avoir leur âge aujourd'hui où tout est beaucoup plus difficile. Deux noms simplement : mes camarades et amis de la revue Ligne de risque, Yannick Haenel et François Meyronnis. Lisez tout de suite le livre de David Di Nota, Bambipark, qui vous fera le plus grand bien dans la description du désastre humanitaire.

nora : Vous semblez indifférent aux insultes, dont après Sartre et Beauvoir, vous détenez une sorte de record, même si Christine Angot est en passe de rejoindre le club des insultés a priori, sans même les lire. Mais n'est-ce pas un peu lassant, cette pratique, très française au fond ? Je lis parfois des critiques dures dans la presse étrangère, mais pas ce type d'injures.

Philippe Sollers : Il y a un fond fasciste français qui est loin d'avoir disparu et qui est prêt à remonter à la surface à la moindre occasion. Regardez ce qui se passe aujourd'hui et l'appétit extrême pour les histoires de collaboration, par exemple dans le dernier livre de Dominique Fernandez, de l'Académie française, consacré à son père, que l'on voit défiler avec le porc Doriot dans les rues de Paris. Les insultes sont vivifiantes, elles prouvent que la connerie se porte bien, ce qui est tout à mon avantage.

Voyageur : Vous êtes un infatigable voyageur de l'espace, du temps et des mots, sur le papier comme sur les écrans. A quelle époque auriez-vous souhaité vivre ?

Philippe Sollers : Aujourd'hui, sans aucun doute. Tout est possible, mieux que jamais, mais c'est comme si chacun se l'interdisait. Etrange...


Si ce ne sont pas les FF, ce serait le signe que les choses vont mal.

Observatoire de la barbarie judiciaire

Sabotage est heureux d'inaugurer aujourd'hui une nouvelle rubrique, intitulée "Observatoire de la barbarie judiciaire" (OBAJ).
"PARIS - Un homme condamné pour viols sur sa fille à 12 ans de réclusion criminelle en 2001 s'est vu refuser lundi la révision de son procès, bien que sa victime présumée dise avoir menti et soit déclarée médicalement vierge."
La victime est-elle encore une victime "présumée", en tant que l'auteur "présumé" de l'infraction a été condamné, et est donc réputé coupable ? Stupidité cosmique de la "justice".

"La commission de révision des condamnations pénales juge que la rétractation de Virginie Madeira, aujourd'hui âgée de 23 ans, n'est pas probante. Elle estime par ailleurs que les expertises ne permettent pas de conclure sur l'existence d'abus sexuels."

On ne peut pas conclure sur l'existence ou non d'abus sexuels, donc on refuse la rétractation de la "victime". C'est sans doute le principe judiciaire de "bénéfice du doute qui profite à l'accusé". L'accusé a bien profité : 6 ans en taule.

"Ces deux points ne constituent donc pas "un élément nouveau de nature à jeter un doute sur la culpabilité du condamné", conclut la commission dans son arrêt.

La révision d'une condamnation criminelle définitive n'a été prononcée que six fois en France, la dernière en date au bénéfice de Patrick Dils. Condamné à perpétuité en 1989 pour un double meurtre, il a été rejugé et acquitté en 2002.

Antonio Madeira, entrepreneur en bâtiment de 55 ans, avait été arrêté en 1999 après les déclarations de sa fille, alors âgée de 14 ans, devant une camarade de classe. Elle disait avoir été victime d'abus sexuels répétés de la part de son père. Virginie Madeira a publié en 2006 un livre intitulé "J'ai menti" où elle disait s'être enfermée dans un mensonge.

Son père, qui a bénéficié d'une libération conditionnelle après six ans de prison, avait saisi la commission, placée auprès de la Cour de cassation, pour obtenir un nouveau procès et une forme de "réhabilitation" judiciaire.

Les magistrats la refusent, même si une expertise médicale qu'ils ont demandée lors de leur contre-enquête conclut que l'hymen de la jeune femme est toujours intact.

Ces travaux ne permettent pas d'écarter l'existence de certains types d'abus sexuels dans l'enfance de la jeune fille, estiment les juges, qui ont suivi l'avis du parquet général.

Ils disent, par ailleurs, que l'examen du dossier permet de conclure qu'elle avait conscience dès le début de l'implication de ses déclarations, qu'elle a montré de la peur en 1999 et 2000 quand son père a été laissé ou remis en liberté."

Il a visiblement échappé aux magistrats que le fait que "la victime" a peur n'a que fort peu de rapport avec la culpabilité de "l'auteur". Quiconque fait jeter un innocent en prison pendant 6 ans a la trouille de celui-ci quand il sort. Faisons une comparaison légère : en 1945, les nazis en fuite pétochaient à l'idée de se faire rattraper par les soviétiques. Cela fait-il du charmant Heydrich une petite victime ?

"Les juges soulignent que jusqu'à son livre, elle a constamment réitéré ses accusations d'inceste, devant le juge des enfants, les éducateurs ou les assistantes maternelles." (source)

"L'auteur" nie, "la victime" nie, tout le monde nie, les juges foutent en taule : splendeur de la "justice". La parole de la victime est sacralisée tant qu'elle est accusatrice ; si d'aventure elle ne l'est plus, alors elle perd tout crédit aux yeux des magistrats.

La justice fabrique des "violés" à leur corps défendant : c'est elle qui viole, à la fois la victime, et à la fois le coupable (par le charmant supplice de la prison).

Les ultimes résidus, consternants, de la chute du féminisme

Dans le torchon gratuit « Métro » du jour, les deux premières pages sont consacrées à la grossesse de Rachida Dati. La présidente d’un groupuscule situationniste patronal (E.T.H.I.C.), Sophie de Menton, critique l’image donnée par Rachida Dati.

Parenthèse : E.T.H.I.C., cela veut dire « Entreprises de taille humaine, indépendantes et de croissance » (que le dernier ferme la porte). Un acronyme tout à fait étrange. Toute entreprise n’est-elle pas « indépendante et de croissance » ? Ce verbiage stupide ne semble là que pour donner au sigle ses deux dernières initiales, et ainsi devenir dicible (c’est mieux que ETH). Nullité magistrale du marketing. ETHIC organise chaque année la « Fête des entreprises ». On peut voir des affiches dans le métro : une mongolienne à lunette saute de joie, barrée d’un joyeux « J’aime ma boîte ! ».

« Parce que l’entreprise, on a tous une bonne raison d’en être fier ! ». Il se joue dans cette opération sémantique une espèce de phase 2 de la droitisation de la société ; une prise de conscience patronale de l’importance de jouer sur les référents symboliques et de sédimenter la domination jusque dans les inconscients. On a gagné la guerre économique et politique, maintenant il faut gagner celle du désir, semble nous dire ETHIC. Erotiser le capitalisme managérial. C’est tout de même une opération remarquable, une borne est franchie – dans l’indifférence, cela dit. Fin de la parenthèse.

Un deuxième article orne la page deux du torche-cul gratos. L’on y voit la mine réjouie d’Isabelle Alonso, présidente des « Chiennes de garde ». C’est une sorte de petit éditorial (étrange formule, à la vérité ; Alonso fait-elle partie des salariés de Métro ?) qui s’intitule « Mère courage ».
"Partout dans le monde et depuis toujours les femmes ont accouché ET travaillé. Rachida suit les traces de sa mère, elle en a le courage et la ténacité. Cependant, l'organisation de la vie politique et des institutions date d'une époque où il y avait d'un côté des gens qui faisaient de la politique, et de l'autre des gens qui mettaient les enfants au monde.

Aujourd'hui, c'est fini, les femmes sont là. Il s'agit de tout réorganiser en fonction de cette donnée. Faire comme si tout le personnel politique était féminin. Il est parfois prioritaire, pour le salut du pays de demain et le bien-être général, de s'éloigner ou d'être là d'une autre façon (la technologie le permet), de déléguer sans y risquer son avenir. Un véritable esprit d'équipe permet d'assurer les mêmes fonctions en les personnalisant un peu moins.... Un peu d'imagination, de bonne volonté et de courage politique, un esprit plus collectif et le tour est joué, pour une démocratie digne de ce nom... Bienvenue à Zohra."
Ce qui plait à la "féministe" Isabelle Alonso, c'est que "Rachida" (elle n'a visiblement qu'un prénom) enfante. Ça c'est bien. C'est magnifique, même. L'engendrement. La reproduction de l'espèce.

Mais "Rachida" ne fait pas qu'enfanter ! Elle enfante courageusement, en reprenant immédiatement le travail. "Mère courage". Héroïne. A l'égale des hommes. Fières de "Rachida".

Il y a effectivement un grand courage à reprendre le travail lorsqu'on dispose de quinze nounous de luxe pour garder la chiarde. De limousines à gyrophares pour rentrer à la maison autant de fois par jour que nécessaire. Un courage qui émeuvrait beaucoup d'autres femmes courageuses, Louise Michel, Simone de Beauvoir. Le charmant castor verserait une larme de fierté devant le courage de "Rachida".

On atteint, avec Isabelle Alonso et ses copines, le point ultime du déclin du féminisme, devenu une idéologie d'encensement de la procréation et de la droite au pouvoir (et singulièrement de la ministre d'extrême droite Rachida Dati). "Bienvenue à Zohra" !

Il fut un temps où le mouvement des femmes était un espace de gauchisme, de critique sociale et de remise en cause des genres, des rôles sexués, des catégories. Il est devenu l'idéologie la plus à droite du vaste spectre de la pensée occidentale. Isabelle Alonso est un marqueur de cette course à l'ultradroite du "féminisme".

On se souvient aussi de la levée de bouclier ultra-répressive, au moment de la libération de Bertrand Cantat, sur le thème "sa remise en liberté banalise les violences faites aux femmes". Les femmes comme agents de la mise en taule, c'était beau !

Criminalisation du viol, hystérie répressive, sacralisation de la procréation, de la maternité, de la famille, du travail, du régime sarkozyste, pornophobie, putophobie : quelles sont douces et bonnes, les conquètes du féminisme ! Le catholicisme patriarcal a-t-il un allié objectif plus fidèle ?

Sondage Opinion Way sur Dati : Bakchich déraille

Le site Bakchich.info, source à laquelle souvent s'abreuve Sabotage, joue au "grand média d'information" en copinant avec Opinion Way (entreprise de questionnaires en ligne rémunérés destinés à valoriser l'exécutif sarkozyste ; lire absolument notre enquête définitive sur le sujet, "Pour en finir avec Opinion Way").

Rien de très surprenant : Bakchich n'est pas Le Plan B. Mais lorsque le sondage en question se prend une avalanche de réactions négatives, la justification bakchichienne devient totalement foireuse et d'une absolue mauvaise foi...

Bakchich publie donc un sondage Opinion Way, "démontrant" (avec forces graphiques Excel) que "51% des Français veulent que Dati garde son poste" (première version du titre). Lorsqu'on connaît les méthodes d'Opinion Way, qui feraient passer la cuisine de l'IFOP ou de CSA pour rigoureuse et rationnelle (c'est dire), on ne s'étonne pas du résultat. En revanche, que Bakchich, censé marquer sa différence avec la médiacratie sondolâtre, s'adonne aux pratiques du Figaro et de la presse gratuite, c'est effectivement très étonnant, et naturellement très décevant.

Le journal feint de ne pas le comprendre. Il risposte en effet aujourd'hui à l'avalanche de commentaires négatifs par une pitoyable autojustification. Lisons-là ensemble...
"Dès le mardi 16 décembre à 08:13, une sanction, anonyme à défaut de divine tombe : « Bakchich semble s’ancrer de plus en plus à droite. » Ah l’insulte, la calomnie. Diable. Pas même un nom que l’on peut traîner en diffamation. Etre de droite, suprême avilissement…"
L'auteur de l'article (Xavier Monnier) souligne que la réaction est anonyme (ça-rappelle -furieusement-les-méthodes-de-la-presse-des-années-trente). Et, démocrate, il rappelle aux ignorants commentateurs anti-Opinion Way qu'être de droite n'est pas condamnable par essence ("Citoyenneté... blabla... démocratie... républicain... gnégné... débat... dialogue...").

Pas question pour Bakchich de battre sa coulpe, de regretter d'avoir déboursé on ne sait combien de centaines d'euros pour se payer cette prestation merdique auprès d'un opérateurs dépourvu de la moindre crédibilité - alors même que le journal est en grande difficulté financière. Pas question de prendre conscience du manque de sérieux des sondages, et particulièrement de ceux de cet institut, ou de leur manque d'intérêt médiatique. Non, cette bérézina était "Une jolie idée" (© Xavier Monnier).
"Attaquée, décrochée au sein du microcosme élyséen, étrillée par le milieu judiciaire dont elle a la charge, Rachida Dati n’a pas le vent en poupe. Et charitablement, Bakchich, dont elle est un peu la seconde muse après la délicieuse Ramatoulaye Yade, a cherché à confronter vision du pouvoir et vision de ses supporters. En se trompant de titre certes. Au lieu d’une majorité de Français, il fallait titrer, comme ce fut fait un temps après « les sympathisants de droite plébiscitent Rachida Dati ». Trois quart des sondés osant avouant qu’ils sont de droite, adorent la Garde des Sceaux. Malgré son côté bling-bling. Malgré ses déclarations sur l’emprisonnement des enfants dès 12 ans. Malgré sa réforme à la hache de la carte judiciaire. Fichtre, l’horrible réalité [...]"
"Confronter vision du pouvoir et vision des supporters"... C'est beau comme du Dominique Wolton. Où est la "vision du pouvoir" dans le flop bakchicho-opinionwaysque ? Où est la "confrontation" (retour au discours citoyenniste) ? Le plus énorme étant cette petite mention : le sondage d'Opinion Way, c'est, bien entendu, "l'horrible réalité". Dura lex, sed lex. C'est peut être pas satisfaisant, mais c'est la froide et intangible loi de la réalité. Hummm, let me laugh Ninja Turtle... Que quelques dizaines de péquins CSP++ rémunérés par des cadeaux, ouvertement de droite, répondent par quelques clics à un questionnaire incitatif, c'est, pour Bakchich, la réalité. Dans le domaine du foutage de gueule, on atteint en effet les frontières du réel.

Le journaliste cite ensuite très longuement un commentaire qui soutient fortement l'initiative de Bakchich. Les précédents commentaires, à charge, n'excédaient pas quelques mots. Mais lorsque vient le temps du plaidoyer, il y a 20 lignes non stop. Dialogue, confrontation, démocratie, hein, Xavier ?

Conclusion de l'ami :
"Bref, en se jetant à contre-courant du pouvoir et de son public supposé, Bakchich a ouvert deux fronts en un papier. Belle rentabilité. Heureusement, il en est des réactions des internautes comme des sondés. Toujours contestables, contestés et puisés dans une minorité."
L'autojustification de Bakchich, on l'aura compris, consiste en une tentative d'irrationalisation des réactions négatives, venant de pauvres hères anonymes qui refusent le dialogue, le pluralisme et la démocratie ; qui sont minoritaires, excédés et ne comprennent pas bien "la réalité", les chiffres.

Or, l'irrationnel, dans cette affaire, est uniquement du côté de l'hebdomadaire, qui a voulu payer son sondage, s'est adressé à l'Institut le plus contesté et l'a commenté de façon malhonête. Les gogos, c'est Bakchich, pas les commentateurs.

Hugues Serraf : la droite néolibérale colonise Rue89

Rue89 fait dans l'ouverture : le député UMP Frank Riester, par exemple, y tient un blog. Mais parmi les contributeurs du site, il y a plus à droite que Frank Riester : Hugues Serraf.

Hugues Serraf à Rue89, c'est un peu comme si Gérard Filoche tenait un bloc-note dans le Figaro. Evidemment, cet hiatus est brandi comme argument pour justifier la chose : Rue89 s'auto-félicite ("ouverture", "pluralisme") et Serraf beugle qu'il est un "libéral de gauche". "Oui, vous avez bien lu. Libéral de gauche", confesse-t-il lui-même d'un ton forban - parce que c'est un rebelle follement anticonformiste qui brise à lui tout seul tout un tas de tabous.

Le "libéral de gauche" défend à peu près tout ce que le régime sarkozyste propose. L'autonomie des universités, la réforme constitutionnelle, le traité de Lisbonne, le service minimum d'accueil à l'école, la privatisation de La Poste, la restriction de l'immigration, la réforme de l'assurance-chômage, le travail du dimanche. Il adore Margaret Thatcher, les OGM, trouve que les saboteurs du rail sont un "panthéon de crétins" (vive la présomption d'innocence) et que les grévistes sont des preneurs d'otage... Le plus savoureux étant sans doute cette justification pleine d'applomb, cette glorification, même, de l'offre d'emploi proposée par l'ANPE : un poste à Pondichéry payé 160 euros par mois. Parce que, n'est-ce pas, "passer un an ou deux dans un pays en plein boom technologique et économique pour un salaire localement raisonnable n’a rien de débile".

On le voit, à côté d'Hugues Serraf, Frank Riester est un bolchevik hirsute.

L'actualité est aux "émeutes" en Grèce, et sur ce phénomène, le chroniqueur de Rue89 a une opinion.

D'abord, Serraf rappelle qu'un lycéen qui manifeste de bonne foi, ça n'existe pas. Et ça, c'est un totem pour tout bon néolibéral-conservateur qui se respecte. "Faites le test demandez à un lycéen (ou à un étudiant) dans une manif contre quoi il proteste au juste et il vous répondra qu'il est venu gueuler contre "la privatisation de l’Education nationale et la destruction programmée de l’université"".

Il faut ensuite s'en prendre à la sociologie et à Bourdieu, passage obligé quand on dévore les "analyses" d'Ivan Rioufol d'une seule main : "Dans Libé, toujours lui, désolé, une sociologue dont je subodore qu’elle possède un poster de Bourdieu au-dessus de son lit, affirmait vendredi que nous sommes sur "une poudrière" et recyclait les mêmes clichés sur le déclassement de diplômés forcés de travailler chez McDo (elle pourrait aussi se demander s'il ne faudrait pas arrêter de former autant de ses futurs confrères chaque année pour éviter ça, mais non...)".

On note la reprise de la critique malthusienne du système éducatif, selon laquelle il faut abandonner les formations littéraires ou en sciences sociales parce qu'il n'y a pas de débouchés. Une ligne très sarko-sarkozyste, pour changer.

On en arrive, après maintes pérégrinations néoconservatrices, à la conclusion en forme d'apothéose : "C’est d’ailleurs l’un de nos seuls vrais points communs avec la Grèce, dont ni la démocratie fragile ni l'économie chancelante ne seront ragaillardies par une semaine de violence nihiliste. Et clairement, les apôtres de "L’insurrection qui vient", saboteurs ferroviaires authentiques ou pas, ne sont porteurs d’aucune bonne nouvelle."

Les violences des jeunes sont "nihilistes". Comme était "nihiliste", selon la presse qui ment, la communauté de Tarnac. On n'objectera pas au joufflu Serraf qu'il ne comprend rien au terme qu'il emploie - par définition, un nihiliste n'utilise pas la violence puisqu'il ne croit en rien (de nihil, en latin).

Face à cette débauche de "libéralisme de gauche" (rappellez-vous), il y a quelques "riverains" de Rue89 (c'est le terme un peu stupide qui prévaut sur le site) qui s'interrogent sur l'appartenance de Serraf à la gauche.

Pour toute réponse, le courageux briseur de tabous ressort un vieil article qu'il avait publié en juin dernier sur son blog dans des circonstances similaires, en l'actualisant un brin (ici la première édition, ici la version réchauffée pour Rue89). Où l'on apprend que Serraf est bien de gauche, évidemment ; mais qu'il s'amuse du manichéisme un peu bouffon qui ne s'accomode pas de la puissante "complexité" et des multiples "paradoxes" de sa philosophie politique.

Malheureusement, la mise au point ne satisfait pas les plus gauchistes des "riverains". Serraf, poussif, ressort son mépris à chaque nouvel interlocuteur. Une fois, deux fois, trois fois... Et là, tout à coup, au milieu de la discussion, ce petit commentaire étonnant apparaît :

"Personnellement, j’hallucine un tantinet au vu de l’agressivité et de la vulgarité crasse des commentaires sur l’article précédent. Tout ça me rappelle fichtrement le ton employé sur les forums de fachouilles. Je suis problablement moizossi un sale socio-libéral-démocrate vendu aux puissances occultes capitalo-mondialiste, mais je tiens à tirer mon bonnet (ne possédant point de chapeau) à H.Serraf pour sa courtoisie, sa patience et sa volonté de dialogue face aux propos carrément insultants de certains qui se lâchent d’autant plus facilement qu’ils sont bien cachés, eux, derrière l’anonymat d’un pseudo".

C'est signé "Eden" (commentaire n°24). Dans une hilarité totale, le lecteur s'aperçoit que Serraf signe ici sous un autre pseudo son petit paragraphe de self-defense pour faire croire qu'il est soutenu et auto-louanger son "courage". Le syndrôme Alain Delon a encore frappé, et le "complexe" penseur parle de lui à la troisième personne !

En langage de "jeune branleur rebelle", on dirait "MDR".

Julien Coupat et Yldune Lévy sont "Détenus Particulièrement Surveillés" !

On l'apprend au détour d'un articulet de Bakchich : Julien Coupat et Yldune Lévy, indûment déportés à la Santé et à Fleury-Mérogis, sont DPS. Détenus Particulièrement Surveillés.

Ce régime de détention spécial, réservé aux "cas" censés être les plus dangereux, les plus susceptibles d'évasion ou de rébellion, a été appliqué aux deux jeunes gens. Il faut dire que le classement DPS est automatique pour les affaires de "terrorisme"...

En utilisant donc la qualification de "terrorisme", rendue possible par une dilution irrationnelle et perverse du sens des mots et l'interprétation policière des actes présumés, l'appareil sadique-répressif a pu garder à vue les jeunes gens pendant 96 heures ; les déporter dans les camps de concentration de la Santé et de Fleury-Mérogis en dépit d'un dossier "sans preuve formelle", ainsi que l'avoue l'accusation ; les classer "DPS".
Le détenu inscrit au fichier D.P.S. se voit appliquer des mesures de sécurité particulières, mais variables selon les établissements. Les fouilles, les transferts et les contacts avec l’extérieur seront strictement surveillés. Ceci entraînant des contraintes pour le prisonnier et bien souvent pour sa famille. La famille déjà pénalisée par l’éloignement du lieu d’incarcération du détenu, conséquence de la centralisation des instructions à Paris, ne pourra effectuer ses visites au parloir que dans des conditions particulières. Les détenus particulièrement signalés- surveillés- n’ayant pas le droit de communiquer entre eux, ne peuvent donc se rencontrer au parloir ni sur le trajet pour y aller ce qui réduit d’autant les disponibilités d’attribution des heures de visites. (prison.eu.org)
A ce stade d'hypocrisie, de manipulation, où l'institution qui porte le nom de "justice" (sombre ironie) agit de concert avec la police, on tremble de rage...

La bêtise des procédures automatiques apparaît dans sa lénifiante horreur. Comme si Yldune et Julien, présumés innocents de faits pour lesquels aucune "preuve formelle" n'existe, étaient susceptibles de s'échapper... Comme s'ils étaient des "terroristes"...

L'appareil répressif, incarné ici par les barbouzards de l'anti-terrorisme, continue sa construction paranoïaque du terrorisme, comme le montre le rapport d'enquête du SDAT, dont voici les premiers mots :

"J’ai l’honneur de vous rendre compte des investigations diligentées en exécution des réquisitions citées en référence et ayant permis d’identifier et de démanteler une structure clandestine anarcho-autonome basée sur le territoire national et se livrant à des opérations de déstabilisation de l’Etat par des actions violentes menées au cours des manifestations se tenant en marge de chacun des grands événements politiques ainsi que par des actions de sabotage des infrastructures de transport."

Une "structure clandestine" tellement clandestine qu'elle tenait l'épicerie du village et louait ses locaux au Maire... "se livrant à des actions de sabotage" (tant la volaille régimaire chie sur la présomption d'innocence)...

Le classement DPS de Julien et Yldune participe de ce travail acharné à constituer des coupables pour rendre légitime l'horreur de la répression policière qui structure le régime actuel.

Les "nihilistes" de Tarnac libérés : la presse et la police déraillent

Les inculpés du 11 Novembre sont libérés.

Souvenons-nous de cette une abjecte de Libération, qui ne respectait pas la présomption d'innocence !

Souvenons-nous de cette une joffrinesque qui reprenait mot pour mot le lexique des barbouzards de l'antiterrorisme, ce concept fumeux "d'ultra-gauche", et la parole du Ministère de l'Intérieur.

Et maintenant, que sonne l'heure des comptes pour la presse régimaire et les journaleux aux ordres.

Que pense Christophe Cornevin de cette libération, lui qui parlait de "nihilistes clandestins potentiellement très violents" ? Lui qui vomissait que, "susceptibles d’être violents, ces nihilistes clandestins voulaient s’attaquer à un symbole de l’État" ? Cornevin, lui aussi, n'a pas respecté la présomption d'innocence, crachant à longueur d'articles diffamatoires que les inculpés étaient de dangereux terroristes.

Le même Christophe Cornevin, visiblement en pleine érection, était pourtant sûr de lui, une garde-à-vue de 96 heures devait normalement déboucher sur des aveux en bonne et due forme : "Les langues peuvent parfois se délier au terme d'une garde à vue de 96 heures, surtout quand des suspects d'à peine 25 ans sont sur le gril".

Pas un mot du Figaro, à 16 heures, sur ces libérations... Etonnant silence, par rapport au traîtement de l'arrestation, avec ses gros titres, ses reportages photos et ses chroniques minutes par minutes ! ("L'ADN au coeur de l'enquête", "Les images exclusives de la caténaire de la peur", etc.). Cornevin, il est où ton ADN censé prouver la culpabilité des "déséquilibrés"?

Et que penser de l'impunité de la racaille qui nous gouverne, de cette Ministre de l'Intérieur qui lâche 150 gorilles de l'anti-terrorisme pour capturer neuf jeunes, des garde-à-vues injustes et dégradantes qui durèrent plus de quatre jours et de ces incarcérations sans la moindre preuve formelle ? Des conférences de presse où MAM assurait que ces "excités" de la mouvance "autonome" étaient les coupables ? Des autosatisfecits de Sarkozy ? Des mines réjouies de Laurence Ferrari, au JT de TF1, lors de l'arrestation ?

Médias, polices, justice, gouvernement : l'épisode a montré qu'ils marchaient main dans la main pour rendre cette société plus violente, plus injuste, et moins libre.

Les méthodes de la juge Muriel Josié : fouiller les anus diffamatoires

La juge Muriel Josié a fait palper l'anus d'un journaliste, à deux reprises, pour un simple délit de diffamation.

On imagine donc que si la juge Muriel Josié "instruit" un dossier un peu plus hard (coups et blessure, par exemple), le prévenu devra s'attendre à un fist en bonne et due forme.

C'est tous les jours que cette "justice" de barbares (sauf la juge Muriel Josié, que son oeuvre rédemptrice soit fêtée pour les siècles des siècles) tabasse, humilie et torture des hommes et des femmes.

C'est au nom de l'idéologie vengeresse et répressive et du "respect des victimes" que les petits procureurs, juges, flics et autres chefaillons reproduisent sur les inculpés les comportements qu'ils sanctionnent.

La juge Muriel Josié - que ses flatulences embaument les palais de justice pendant toute la durée de sa sainte mission ! - n'a pas l'air d'être la moins assoiffée de répression des magistrats de ce pays.

Les bonnes âmes critiquent le fait que ce journaliste ait été traité "comme un criminel". Mais il est également intolérable qu'un criminel puisse être traité de cette façon. Cette douce institution qui porte le nom de "justice", nous estimons qu'elle ajoute de la violence au monde au lieu d'en soustraire, qu'elle est l'exact et radical inverse de "La" Justice, et que la juge Muriel Josié - que chacun de ses détracteurs soit immolé par le feu - est une excellente représentante de l'institution dont elle est issue.

Police partout, justice nulle part.

Libérez Julien Coupat et les autres !

Voilà plusieurs jours maintenant que Julien Coupat et ses "complices" dorment dans les taules concentrationnaires de notre pays.

Leur crime, infâme, ignoble, abject, serait d'avoir ralenti pendant quelques heures les flux de marchandises et d'humains par voix ferroviaire. Ils ont également manifesté. Comme vous, comme nous. Ils possèdent également chez eux des objets métalliques, un ordinateur portable et "L'insurrection qui vient".

Assez de ce régime de fascistes qui accole à ces gens l'épithète imbécile, exorbitant et pathétique de "terroriste" !

Ce ne sont pas des terroristes. Le procureur de la république, aux ordres de la ministre de l'intérieur, provoque une dilution irrationnelle du sens des mots pour mettre au cachot des personnes totalement inoffensives. Si la qualification de "terrorisme" est retenue pour cet acte ; alors qu'est-ce qui, juridiquement, empêche que tout acte malveillant commis à plusieurs lui échappe ? Si le sens de ce mot est extrapolé jusqu'ici, en quoi le fait de crever un pneu de 4x4 avec deux amis n'est pas un acte terroriste ? En quoi le fait de briser une cabine téléphonique n'est pas un acte terroriste ?

Aucune goutte de sang n'a été versée : jusqu'où ira l'hystérie sadique de ce pouvoir ultra-sécuritaire (dont les ressemblances avec le Régime de Vichy s'amoncèlent) ?

Plus personne ne doute des motivations ignobles qui sont derrière l'opération policière et judiciaire lamentable qui brise en ce moment plusieurs êtres humains : il s'agit, pour le gouvernement et ses hyènes, de susciter un énième contre-feux, au moment où sa politique barbare est plus que jamais violente envers la majorité, au moment où le capitalisme le plus débridé, qu'il a contribué à installer, vacille.

Il s'agit de construire un "ennemi intérieur", hypothèse indispensable à tout régime fasciste, à toute reprise en main sécuritaire, à toute restauration nationale.

Il s'agit, pour la ministre de l'intérieur, très prosaïquement, de monter un coup "politique", de se relancer face à un Président qui souhaite l'écarter.

Il s'agit, pour le procureur Jean-Claude Marin, de bâtir et de fantasmer un grand coupable contre lequel pourra se déchaîner l'habituelle monomanie sadique-répressive du petit peuple, et d'ainsi faire oublier ses innombrables casseroles.

Il n'y a aucun élément solide qui puisse autoriser l'Etat Français à garder dans ses bagnes Julien Coupat et ses amis.

Qu'ils les libèrent, car leurs manœuvres de diversion n'ont trompé personne !

Gouvernement de fous, "justice" de barbares, répression de tarés de la civilisation.

Lire absolument la tribune de Giorgio Agamben, "Terrorisme ou tragi-comédie ?"

L'ex-fasciste Gérard Longuet reconverti en curé homophobe

Où sont passées les valeurs d'Occident, auxquelles adhéra Gérard Longuet ? Paganisme, culte du corps, statuaire viriliste ; le sénateur UMP a renoncé à toute cette quincaillerie cryptogay. Apparemment, Longuet a vraiment tiré un trait sur ses errements de jeunesse, il est bel et bien un vieux curé homophobe, totalement ignorant de ce qu'est la sexualité.



Gérard Longuet devrait se voir offrir une formation accélérée en éducation sexuelle, parce que franchement :

- L'homosexualité n'est pas tout à fait une "forme nouvelle de sexualité", comme le couine ce vieux fennec. Platon, ça te dit quelque chose, Gégé ?

- Faire de la prévention contre l'homophobie, c'est pas tout à fait la même chose que faire "la promotion" de l'homosexualité. Ça c'est un trait marquant des discours antigay sur le sujet : toute monstration de l'homosexualité est une promotion, ce qui revient à dire que la majorité des jeunes gens sont en fait tous de sautillantes pédales refoulées et qu'il suffit qu'on leur exhibe une vague photo floutée de baiser entre deux hommes/femmes pour que, toutes barrières rompues, ils s'adonnent au vice sodomitique/saphique...

- L'homosexualité n'a pas plus de "liens" avec la pédophilie que l'hétérosexualité. Après le procès Dutroux, on a entendu personne beugler que la promotion de l'hétérosexualité risquait fort d'encourager de nouvelles séquestrations de jeunes filles.

Les personnes âgées, dont l'activité encéphalique est strictement équivalente à l'activité phallique (théorème de Longuet), ont une vision de la sexualité qui se borne au bon vieux missionnaire reproducteur avec mémère. Il est dommage qu'ils président aux destinées de cette nouvelle Sodome et Gomorrhe qu'est la France.

Christophe Cornevin, fidèle lèche-cul de la droite régimaire

Christophe Cornevin, journaleux du Figaro, a commis un papier en passe de devenir culte ("Sabotages de la SNCF : la piste de l’ultragauche").

Si Sabotage se sentait une affinité avec BHL, il n'hésiterait pas à rapprocher Christophe Cornevin de ses collègues qui sévissaient "dans-les-années-trente".

Après, donc, que le très modéré Christophe Cornevin ait vomis que "susceptibles d’être violents, ces nihilistes clandestins voulaient s’attaquer à un symbole de l’État", il dévoile, attention, "les images exclusives de la caténaire de la peur".

Si ça c'est pas du terrorisme "nihiliste" ultraviolent ultraradical ultragauchiste ultrabolchevik ultradangereux !

Mais Christophe Cornevin, hyène au service de la répression sécuritaire, de la droite qui rafle et qui expulse, ne s'arrête pas là, non non !

Voici son papier, réactualisé, sous un nouveau titre, tout frais, d'aujourd'hui : "Sabotage du rail : l'ADN au coeur de l'enquête".

Sabre au clair contre les gauchisses !

Le "cerveau" du groupuscule ultraterroriste ultraméchant ? Julien C. "Cet ultra de 34 ans aurait pu avoir une vie sociale parfaitement intégrée s'il n'en vomissait pas les règles", dégorge, psychologue, Christophe Cornevin. "Se réclamant de l'héritage d'Action directe, des Brigades rouges italiennes et d'un esprit libertaire post-soixante-huitard assez paranoïaque, ce fils de cadre supérieur a confortablement grandi à Paris". On croirait une expertise psychiatrique en milieu carcéral.

Il est à noter que Christophe Cornevin ne respecte pas la présomption d'innocence.

Christophe Cornevin, il est peut-être temps que tu écrives à Minute et que tu prennes ta carte au FN, tu ne crois pas ?

Quand Jean Arthuis s'en prend plein la gueule

Comme toujours, les "centristes", qui sont censés être ni-droite-ni-gauche, sont en fait des ultra-libéraux fanatiques. Le sénateur plan-plan Jean Arthuis, qui vient empuantir quelque fois les plateaux télés de son haleine de financier repu, vient de pondre pour Le Monde une grosse crotte centriste, c'est-à-dire un chant d'amour à l'ultracapitalisme darwinien le plus hardcore.

"Je me méfie du capitalisme d'Etat : l'Etat actionnaire, c'est le mélange des genres".

Rien que ça. Cette phrase veut quand même dire que le monsieur est pour la privatisation totale de La Poste, de la SNCF, etc. Déjà au moment du sarkozysme triomphant, rares étaient les gros lards à lunettes qui poussaient aussi loin la modernitude.

Mais maintenant que le capitalisme a fait la démonstration de sa débilité foncière (25 000 milliards de dollars envolés, des caisses de l'Etat vides qui soudain se remplissent pour sauver des joufflus contractants de golden hello et de golden parachutes), il est tout de même touchant, étonnant, émouvant de voir qu'il y a encore des vieux pépés apparemment un peu paumés.

Peut-être que le vent du boulet change. Les réactions à la lourde phrasounette idiote de Jean Arthuis le montrent, son gros poncif d'énarque eurocon recueille, sur le site du Monde, un accueil un peu frisquet. En gras, nos préférées.

"Mais bien sur, c'est parce que les entreprises payent trop d'impot qu'elles délocalisent. La recherche d'un rendement à 2 chiffres pour satisfaire des actionnaires rentiers n'a bien sur rien à voir. La protection sociale est la source de tous les maux... Et il nous propose quoi ce M. une retraite par capitalisation et des assurances privées comme aux US."

"Dans les premières lignes il oublie le déséquilibre capital/salaires : j'arrête de lire."

"Il me semble que M. Arthuis n'a pas encore saisi les enseignements de la crise. Il faudra pourtant un jour les reconnaître!"

"Méfions--nous de ce sénateur ! Grâce à l'Etat actionnaire, à l'ardente obligation du Plan, dont parlait le Général la France est devenue un Etat moderne dépassant un moment la Grande Bretagne ! Depuis que la finance et la boutique sont aux commandes c'est le déclin ! Qu’est- ce qui intéresse ces gens là, qui se moquent de l'Intérêt général ? Faire le maximum de profits ! Sous prétexte de compétitivité : on exploite les ouvriers Chinois et on jette à la rue les Français !"

"Ce Mr est un représentant supplémentaire du lobby qui a créé l'immense bordel financier dans lequel nous sommes plongés. C'est le blabla de quelqu'un qui redoute les nationalisations que l'on pratique outre-rhin, outre-manche et outre-atlantique. Son avis ira rejoindre la fosse des avis sans intérêt. Quant aux "investissements", j'observe que durant les 50 dernières années, c'est à l'Etat qu'on les doit: autoroute, airbus, tgv, nucléaire, etc.. Rien n'est venu du capitalisme financier!"

"L'Etat actionnaire, ce n'est pas un "mélange des genres", c'est bel et bien une prise de pouvoir que l'incroyable incurie des acteurs privés a rendue nécessaire ! Une partie de l'activité bancaire relève de la mission de service public et par conséquent de l'Etat. Qu'on aie à implémenter cela intelligemment ne veut pas dire qu'on n'aie pas à le faire !"

"Tout simplement, il n'y aurait de mélange des genres si les banques, les bourses et les grandes entreprises étaient un peu plus tournées vers la société et moins vers leur seul profit . On peut aussi dire le contraire : l'État actionnaire, c'est la garantie de la présence des citoyens à ces niveaux."

""savoir si on a les moyens de nos ambitions": les moyens on se les donne quand on a de l'ambition. Sans ambition nationale, pas d'Airbus, de TGV, de nucléaire, d'autoroutes. Si on avait attendu les rapaces financiers pour faire tout cela, rien n'existerait. Quand aux grands groupes privés Dassault, Lagardère, Veolia, Alstom et tant d'autres, ils vivent de finances publiques (commandes militaires ou aménagement du territoire) depuis 50 ans. Les Arthuis ne veulent toujours pas comprendre."

"Les citoyens ont assisté, en direct, à la création de milliards d'euros pour sauver les banques. Cela va devenir plus difficile de leur expliquer que l'on ne peut rien faire pour les sans abris, les chômeurs, l'enseignement, les retraites, l'industrie etc. L'ambition d'abord, l'intendance suivra comme disait un général célèbre."

"Quelle imagination, quelle créativité, quelle révolution!"

"Quand il s'agit de sauver les banques Arthuis ne voit pas de problème au mélange des genres. Avec un tel niveau d'analyse le pire est devant nous..."

"Les dégâts du formatage! Une analyse superficielle de la crise, expédiée en quelques mots, et retour au discours habituel, parfois pertinent mais complètement dépassé face à la gravité de la situation. Conseillons à M. Arthuis de lire l'article de M. Rocard paru dans le Monde il y a quelques jours, on peut apprendre à tout âge. Le tout est de ne pas avoir d'oeillières."

""Je me méfie du capitalisme d'Etat : l'Etat actionnaire, c'est le mélange des genres." Je partage l'avis des autres lecteurs sur la haute tenue intellectuelle du discours de ce Monsieur."

""Nous entrons dans une phase nouvelle, qui doit être marquée par une approche consciente de la globalisation." --- vous croyez sincèrement ? Parce qu'Obama a été élu, parce que Sarkozy réclamme un autre capitalisme ? L'espoir fait vivre... Bientot, tout va recommencer EXACTEMENT comme si de rien n'était... les gros capitalistes vont s'en mettre pleins les fouilles, et les petits continueront à trimer pour une misère... Quoi ? Moi ? communiste ? pourquoi ce serait-ce si mal que ça ?"

"J'arrete de lire après l'intro, je vais sur les commentaires, je rédige celui là et je change d'article... Pas la peine de lire une Nième ineptie capitaliste, surtout quand on sais depuis des années que comme 'ils' disent pour le communisme "ca ne marche pas" (enfin, si mais pas pour tout le monde...) Comment peut on encore être contre un état fortement keynesien ? Je ne comprends pas. Je dois être trop de gauche (sale régulateur va!looser!liberticide!heu...salarié!), ou pas assez friqué..."

"Ce qui est amusant, c'est qu'il y a encore des gens pour réduire le communisme à la Corée du Nord. Le mur de Berlin est tombé il y a près de 20 ans, le mur néolibéral est en train de tomber sous nos yeux. Quant à Jean Arthuis, il ferait mieux de tourner sa langue 7 fois dans sa bouche avant de dire des bêtises."

"Jean Arthuis n'a plus 20 ans non plus... Il vit encore à l'époque où quand l'État investissait dans l'économie, il devait considérer ça comme du communisme... Aucune remise en cause, au contraire: continuons de plus belle..."

Pour conclure :

"Les réactions à cette interview sont particulièrement réjouissantes. Il y a seulement quelques semaines, on aurait eu droit aux sempiternelles arguties néolibérales : "État caca, baisser les impôts, mondialisation, etc." Ce pauvre Arthuis, lui, n'a rien compris. Il est temps qu'on se débarrasse enfin de tous ses "penseurs" et "experts" du siècle dernier."

Rencontrez les experts de votre sécurité : la pub TV

Après l'affiche que vous avez sans doute croisé dans le métro :
























Voici maintenant la pub TV, bientôt sur TF1 :

La prison est "une anomalie, un cancer diffusant ses métastases dans l’organisme sociétal"

Sur son blog de salubrité publique, le taulard Laurent Jacqua publie un texte d'une force impressionnante à la suite des meurtres et suicides qui fleurissent dans les camps de concentration de la République (il rédige ses billets dans sa cellule et c'est son épouse Leïla qui les met en ligne).

Petit rappel : dans le même temps, la "remarquable" et intelligente Rachida Dati veut abaisser la majorité pénale à 12 ans (y a-t-il une réponse plus pertinente aux suicides des 16-17 ans à Metz ou à Strasbourg ?).

"La prison, de par sa nature profondément criminogène, est nuisible et dangereuse pour la société toute entière car elle engendre et relâche des hommes et femmes dont le traumatisme est si grand que leur métamorphose empêche tout retour à la vie sociale dite « normale ». Violences, récidives, dépressions, suicides, toxicomanies, alcoolismes, inadaptations, dangerosités, troubles psychiatriques etc.… voilà le véritable bagage que tout condamné emporte avec lui à la fin d’une peine. Et on imagine, avec tous ces ingrédients, les conséquences désastreuses et les dégâts que cela peut avoir sur le monde extérieur. [...]

La véritable dangerosité ne provient donc pas des détenus mais de la prison elle-même ! En réalité c’est elle qu’il faudrait réinsérer, car elle est une anomalie, un cancer diffusant ses métastases dans l’organisme sociétal !

La prison, telle qu’elle est conçue aujourd’hui, n’est pas là pour réadapter ou réparer mais pour punir et détruire le prisonnier ! Et si ça on ne l’a pas compris, ce n’est pas la peine de chercher un antidote au problème. Il faut réformer totalement le monde carcéral de fond en comble et pour cela il faudrait des moyens colossaux que nous n’avons pas.

La seule solution sécuritaire, même si elle est la plus facile à mettre en place, est une erreur monumentale, car plus la sécurité sera augmentée au sein des détentions, plus la violence y sera à l’étroit et plus elle y sera explosive et barbare. C’est une équation implacable que l’on a d’ailleurs pu constater dans l’exemple criant des prisons américaines type « super max » (de haute sécurité). Dans ces établissements, où souvent aucun espoir de sortie n’est permis, les meurtres entre gangs, entre détenus sont d’une sauvagerie impitoyable, ce qui prouve bien l’inefficacité d’un système sécuritaire pour endiguer la violence carcérale, au contraire cela ne fait que l’exacerber. (Voir à ce sujet la très instructive série documentaire de National Géographique sur les prisons US).

Si l’on voulait transformer les hommes en animaux prédateurs et les prisons en usines à récidivistes, on ne s’y prendrait pas autrement.

Mais alors qu’elle est la solution ?

Hé bien sachez qu’il n’y en a pas ! Car, nous le savons, tout le monde se fout éperdument de ce qui peut bien se passer dans les prisons et puis avec quel gouvernement, quel argent va-t-on se décider une bonne fois pour toute à prendre le taureau par les cornes ?


Oui je suis très pessimiste et je pense que l’orientation se fera sur le modèle américain : constructions de nouveaux établissements haute sécurité, allongement des peines, perpétuités réelles, rétentions de sûreté, et tout un arsenal juridique toujours plus absurde, toujours plus répressif. Le carcéral finira, comme tout le reste, par devenir un bisness, et on y gérera la violence comme on gère une société qui gronde, cela avec toujours plus de flics, toujours plus de rétorsions, toujours plus de lois, toujours plus de règles, toujours plus de répression…de toute façon à cause de la crise mondiale, les sociétés, à moins d’une révolution soudaine qui nous sauverait peut-être, sont en passe de devenir des prisons à ciel ouvert, mais vous ne le savez pas encore. Le jour où vous vous en rendrez compte, bien installé au fond de votre canapé, vous saurez ce que veulent dire les mots « arbitraire », « abolition des droits », « privation de liberté » « surveillance » « fichage » « contrôle » car on y viendra tout doucement jusqu'à ce qu’un jour, vous fassiez vous aussi partie « d’une espèce à part »…


Vous devriez tous, dés maintenant, vous sentir concernés et vous inquiéter des problèmes liés au monde carcéral, car, sachez-le, celui qui s’est fait égorger et qui s’est retrouvé seul face à un tueur psychopathe n’était incarcéré que pour un petit délit routier...

Demain, qui sait, en prenant le volant de votre véhicule, vous pouvez causer un grave accident et vous retrouver illico en prison, cette fosse à purin qui vous dégoûte tant aujourd’hui, et à ce moment là qui vous protégera au fond de votre cellule face à ceux que vous avez si bien ignoré ?...
De nos jours plus personne n’est à l’abri, cela mérite réflexion, non ?..."

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Scoop : Le Parquet donne raison à Jean-Marc Rouillan !

Admirez, mesdames et messieurs, la Justice française. Admirez-là à distance respectable, néanmoins. Les petits procureurs revanchards et punitifs pourraient vous incarcérer vite fait.

Dans l'affaire ultra-actuelle qui concerne Jean-Marc Rouillan, la débilité délirante de l'institution s'est fait jour avec la rapidité et l'ostentation d'une déflagration "terroriste".

Tout le monde le sait, JMR n'a pas le droit de parler des affaires qui l'ont conduit à passer plus de vingt piges en taule. En conséquence, lorsque le journaliste lui pose une question sur ce point, il répond, à la lettre : "Je n'ai pas le droit de m'exprimer là-dessus... Mais le fait que je ne m'exprime pas est une réponse. Car il est évident que si je crachais sur tout ce qu'on avait fait, je pourrais m'exprimer. Mais par cette obligation de silence, on empêche aussi notre expérience de tirer son vrai bilan critique."

Traduction à l'usage des journalistes, des vengeurs masqués et du Juge d'application des peines qui a renfermé Rouillan au mitard :

- Je n'ai pas le droit de m'exprimer là-dessus = je n'en parle pas.
- Mais le fait que je ne m'exprime pas est une réponse = il ne s'exprime pas, et cette non-expression, ce silence, contient du sens. Mais c'est une non-expression.
- Si je crachais sur AD, je pourrais m'exprimer = "si" introduit ici un conditionnel. Cela veut que JMR explore une possibilité hypothétique sans la faire coïncider à "sa" vérité.
- On empêche de tirer un vrai bilan critique d'AD = je n'ai définitivement pas le droit d'en parler.

Au total, donc, Rouillan ne parle pas, il ne parle JAMAIS des affaires sur lesquelles il a l'obligation de garder le silence, à savoir les assassinats de Besse et du général, ou des attentats divers d'AD.

Aussi, la suspension provisoire de sa liberté conditionnelle ne peut en aucun cas se justifier par la transgression de cette obligation de silence. Nous sommes donc en présence d'une justice qui outrepasse très clairement le droit et qui fait preuve d'une sévérité aussi névrotique que stupide.

On comprend que ce qui gêne les justiciers fascistes et les droitards de tous bords, ce n'est pas que JMR ait évoqué les affaires d'AD puisqu'il ne l'a pas fait. Ce qui choque le peuple hargneux des honnêtes gens, c'est qu'il semble ne pas regretter ses actes. Voilà ce qui les fait s'étrangler de haine. A ce titre, ils détournent l'obligation de silence en prétextant qu'elle est transgressée (ce qui est objectivement faux) pour remettre le non-repenti derrière les barreaux.

Et voici qu'intervient, donc, notre "Parquet", dans sa très profonde intelligence. Rue89 l'annonce : "Le parquet, lui, devra faire valoir qu'il a non seulement enfreint l'obligation de silence qui lui incombait, mais aussi que par cette interview, Jean-Marc Rouillan assume le passif d'Action directe. Voire qu'il y fait l'apologie du terrorisme".

Arrêtez-nous si on se trompe. Mais le "Parquet" a l'air de mentir. Rouillan n'a pas enfreint son obligation de silence. Il n'a pas assumé le passif d'AD. Il n'a pas fait l'apologie du terrorisme. Et sur ces trois points, en violation manifeste de la réalité, le parquet fait croire le contraire.

Le Parquet et les braves gens honnêtes voient dans Rouillan la créature maléfique qu'ils veulent y voir. En déformant les non-propos de Rouillan, en les étirant comme les détenus étirent leurs draps pour se pendre en cellule, ils réalisent leur fantasme d'un JMR diabolique. Pour ces gens là, pour la droite en général, criminel un jour égale criminel toujours, on le sait bien. C'est dans les gènes de Rouillan d'être un "terroriste".

Qu'ils sont naïfs, les petits procureurs qui ont le pouvoir : ils voudraient que le détenu qui a purgé 20 piges sans broncher "regrette ses actes". La justice nous fera toujours rigoler. Dans l'esprit tordu des droitards, l'enfermement est censé provoquer l'amende honorable. Il faudra expliquer que, face à une justice pénale aussi cruelle qu'arbitraire, peu nombreux sont ceux qui regrettent leur acte. Ils regrettent plutôt de s'être fait choper.

La justice ne se contente pas d'enfermer (ce qui est une torture), elle exige aussi qu'on tire parti de cette torture, qu'on en jouisse et qu'on finisse par s'en réjouir. Elle veut punir, mais aussi que le puni accepte sa punition.

Comme le note magnifiquement Catherine Baker, "On attend du prisonnier une entière collaboration. Il donne ainsi pleinement raison à l’institution [...] ! Le condamné doit faire sien le jugement qu’a prononcé contre lui la société, s’y rallier de toute sa bonne volonté. Cette joyeuse obéissance peut être une comédie, là n’est pas la question, ce qu’on veut obtenir du détenu, c’est qu’il montre qu’il est capable comme tout un chacun de spéculer sur l’évolution de son prix. Ceux qui refusent de coopérer feront plus d’années de prison" (Pourquoi faudrait-il punir ?).

Le Parquet, en renfermant Rouillan, lui donne raison sur toute la ligne : oui, tu n'as pas le droit de t'exprimer ; oui on t'y autoriserait si tu crachais sur AD. Et maintenant, ta "dangerosité" de "terroriste" va être examinée sérieusement, sans rire, sans gêne, par des hommes emperruqués qui savent pertinemment que tu ne tiendras jamais plus un flingue dans ta main de ta (courte) vie. Mais il faut des prétextes, tu comprends.

Sans crainte d'être trop long et de lasser nos lecteurs, abordons maintenant, toujours dans la droite ligne de cette affaire, le cas d'un droitard qui s'indigne des toutes dernières déclarations de Jean-Marc Rouillan.

"Je ne m'exprimerai pas outre mesure sur le scandale que constitue la parfaite bonne conscience d'un assassin, qui ne regrette en rien ses forfaits. Tout au plus me dis-je que l'expression d'un regret sincère devrait être une condition sine qua non pour pouvoir sortir de prison", nous annonce, d'une voix ferme mais sincère, cet homme de conviction.

Tu pense bien que s'il suffisait de mimer le regret pour sortir de taule, la recette aurait permis à quelques criminels de gambader dans de champêtres horizons plutôt que de crever à petit feu. Et que JMR ne se serait pas fait prier pour s'y conformer. Qu'il était tout à fait à même de jouer cette comédie-là. Que s'il ne l'a pas fait, c'est une preuve de courage et de grandeur plutôt qu'un "scandale".

"Si la Justice doit savoir pardonner, elle ne saurait pardonner qu'à des détenus qui ont prouvé que leur emprisonnement avait permis leur rédemption."

La prison et sa philosophie ne tablent pas sur la rédemption, mais sur la punition. L'unique but est un but de vengeance. Seuls les plus sots des sots croient encore que la prison a un rôle positif et constructif.

"Mais Rouillan n'a pas payé sa dette, ne peut la payer. Il demeure un éternel tueur."

Voilà la vision de toutes les droites : la criminalité est génétique. Il n'y a pas de "crimes", il y a des criminels. Sous la figure de JMR se fait jour celle du monstre. Rouillan est ontologiquement mauvais. Aucune peine de prison ne saurait lui faire expier ses crimes, nous dit l'ami Romain. L'ami Romain voulait qu'il expie des crimes qu'il ne pourra de toutes les façons jamais expier, si on suit bien son raisonnement pharaonique.

Le reste du texte est à l'avenant. La pensée de droite atteint des niveaux zénithaux, tout particulièrement avec cette phrase délicieuse que je vous invite à lire précautionneusement : "Si le dossier réalisé par L'Express peut contribuer à renvoyer l'assassin derrière les barreaux, ce n'est que justice." Traduction : si un papelard remet en taule un homme que la justice avait autorisé à sortir, ce n'est que justice. Qu'un article de presse décide de l'enfermement d'un homme dans les geôles de la République est l'incarnation, en effet, d'une bien belle justice.

Pas la notre, mais alors pas du tout. La notre, de justice (finissons-en là), existera quand seront vidées les prisons.

L'extrême droite et Sarkozy : Le Monde est enchanté

Sur Lemonde.fr, aujourd'hui, est publié un portrait de Patrick Buisson, conseiller de Sarkozy. La journaliste le dépeint sous des traits sympathiques (c'est le but du jeu du "portrait"). Et qu'importe si ce type revendique son appartenance à l'extrême droite ! Raphaëlle Bacqué en rit de toutes ses dents féminines. Il est, explique-t-elle, "l'hémisphère droit du président".

Bacqué s'esclaffe gaiement. Elle a beaucoup enquêté pour écrire son papier. Sous sa plume, la vie de Buisson est une success story, et sa relation avec Sarkozy une histoire d'amour : "C'est en 2004, en zappant sur sa télévision, où il regardait ses émissions politiques sur LCI, que Nicolas Sarkozy s'est décidé à appeler Buisson. Le journaliste marque vite un point déterminant en expliquant : "Chirac va perdre son référendum sur la Constitution européenne." Il a compulsé les enquêtes qualitatives : "Lorsque l'Europe était un rêve non incarné, les Français étaient européens, explique-t-il. Maintenant, ils ont l'euro au fond de la poche. Et ils le rendent responsable de l'augmentation des prix." Pour finir, il assène à un Sarkozy qui ne l'oubliera pas : "Le non l'emportera à 55 %. Si je me trompe, tu ne m'invites plus jamais dans ton bureau.""

Car l'auto-proclamé membre d'Occident est perspicace. Et à l'extrême droite, nous apprend la journaliste, on comprend le bas peuple. "Le véritable réservoir de voix est dans l'électorat lepéniste. Cela tombe bien, Buisson le connaît par coeur." [...] "Il fallait aller chercher l'électorat populaire, c'est-à-dire le plus culturellement conservateur, le plus réticent sur l'immigration et les moeurs". Ce type est un saint homme : prophétique, perspicace, raciste. Des attributs qui payent, en ces temps de Restauration Nationale.

Raphaëlle a visiblement le coup de foudre, en tous cas. Philou est viril et proche des gens : "Depuis, il est le gardien de la ligne. Catholique et populaire. Méfiant envers les musulmans et critique pour les élites. L'hémisphère droit du président". Méfiant envers les musulmans ! Qu'en termes galants ces choses là sont dites. Une méfiance qui ne dépasse pas, on l'imagine, les bornes du débat républicain. Une méfiance rationnelle, qui reconnaît l'importance des droits de l'homme et sait respecter la différence. Même si le zigue, "en mai 1981, entre comme journaliste au sein de l'hebdomadaire d'extrême droite Minute. Dès 1986, il en devient le directeur de la rédaction." C'est pas parce qu'on a écrit des centaines d'articles de propagande hallucinée pour Le Pen qu'on verse automatiquement dans la haine des musulmans ! Il y a un juste milieu.

Peut-être que certains ignoraient qu'un homme d'extrême droite conseillait le président (et pas qu'un peu, visiblement : ""Le président me permet une intervention sans limite", assure-t-il sans fard"). Mais Raphaëlle, elle, le sait ; et on ne peut pas dire que ça la terrifie. Une paire de couilles dans le monde délicat de la politique, ça manquait.

Et on ose parler de lepénisation des esprits ? De fascisation de la société ? Le jour où on ouvrira des camps de concentration, là on pourra monter sur nos grands chevaux.

BHL est chefaillon de Libération, Libération adore BHL

Il faut lire la critique qui est faite aujourd'hui du bouquin de Houellebecq (HLB) et de Bernard-Henri Lévy (BHL) par le quotidien d'extrême droite Libération. C'est un authentique régal.

BHL est le plus mauvais littérateur de l'histoire de notre Nation, comme le démontre cette phrase issue de la quatrième de couverture de "Ennemis publics" : "Je peux faire toutes les mises au point possibles et imaginables : je ne ferai qu'aggraver mon cas de salaud de bourgeois qui ne connaît rien à la question sociale et qui ne s'intéresse aux damnés de la terre que pour mieux faire sa publicité".

Précisons que c'est l'intéressé lui-même qui a hautement beuglé être "un peu sourd à la question sociale" (Libération 8/10/07).

BHL, donc, dont la prose boursoufflée au kilomètre n'est pas sans rappeler les chansons à texte de Michel Sardou ("Bien sûr les années ont passé, les fusils ont changé de main, est-ce une raison pour oublier qu'un jour on en a eu besoin ?"), écrit comme une merde. Et des imbécilités notoires, qui plus est.

Mais il est aussi membre du conseil de surveillance de Libération. Et à ce titre, il jouit d'une critique impartiale dans le quotidien de Laurent Mouchard-Joffrin.

"Bernard-Henri Lévy a le verbe haut, rythmé, emphatique. Ce sont les tambours du tribun, le panache, même lorsqu’il se risque aux confidences", commence Claire Devarrieux, caniche fidèle. On apprend que le père de Lévy est un "inconditionnel soutien du génial rejeton". Car doutiez-vous que BHL était "génial" ?

Grandeur du philosophe à col en pelle à tarte : "Sans aller jusqu’à verser dans la psychologie, force est de constater les tendances dépressives de l’un et la splendide volonté guerrière de l’autre. Bernard-Henri Lévy n’a pas la médiocrité des gens qui se vengent ; il enregistre les manifestations d’hostilité afin de les contrer, pour mieux les oublier. C’est un stratège. Il aime les champs de bataille. Avec une contradiction : il ne se vit pas comme une victime. Il est de ceux qui protègent, qui se sentent responsable de leurs frères humains, quitte à reconnaître le goût de l’aventure qui le pousse vers les nobles causes : il lui faut «entrer à Sarajevo avant tout le monde». Mais il concède la peur, voire la certitude, d’être un jour la proie d’une mortelle injustice." Il faut plaindre cet homme blessé. Ce héros.

Claire Devarrieux, en plus de frétiller devant le courage magnifique de celui qui entre à Sarajevo en flammes ou qui fait croire qu'il entre en Géorgie, apprécie la hauteur de vue de celui qui est à la philosophie ce que les coliformes fécaux sont au steak haché : "Son «retour» à une judéité heureuse et sans religion, la Bible, la Genèse, Lucrèce, les Epicuriens, Althusser, Foucault : la leçon de philosophie de BHL est tonique."

Tentant, n'est-ce pas ? Ce livre, en tous cas, est "une bonne nouvelle", d'après la conclusion de notre amie journaliste. De quoi redresser les places boursières, à n'en pas douter.

Cet anulingus impudique au membre du conseil de surveillance de Libé renseigne sur la dignité des journaleux joffrinesques.